La douleur est un des premiers motifs de consultation médicale. 30 % de la population française souffre de douleurs chroniques. 64 % des patients recevant des traitements antidouleurs se disent insuffisamment soulagés sur le long terme. La douleur est envahissante : on ne pense plus qu’à sa douleur, on ne vit plus que cela, on n’est plus que douleur. Elle perturbe gravement la vie de la personne qui souffre, mais aussi celle de son entourage proche. Quelles réponses la sophrologie peut-elle apporter, en sus des traitements médicamenteux de la médecine ? Comment agit-elle ? Par des techniques simples et efficaces,nous verrons qu’ elle nous permet de développer notre force mentale pour mettre à distance la douleur et mieux la vivre.
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Définition de la douleur
La douleur est difficile à définir. Nous en connaissons le processus physiologique,et pourtant chacun la vit, la ressent de façon différente. Au cours des âges, la douleur a été présentée comme inhérent à notre nature humaine; avec une notion de culpabilité dans les religions monotheistes ( mais qu’est-ce que j’ai fait au bon dieu, pour mériter cela ?). Il n’y a pas si longtemps que la médecine a intégré la notion de soulager la douleur en tant que telle; en accompagnement de la compréhension et la réparation d’un désordre lésionnel physique.
En 1979, l’Association Internationale pour la Douleur propose la définition suivante :
« La douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à un dommage tissulaire présent ou potentiel ou décrite en termes d’un tel dommage »
La douleur est liée à un dommage tissulaire présent ou potentiel . La douleur est , au départ , un signal d’alarme . Pour signaler une agression. Un coup, une blessure, un corps étranger, une infection, une ischémie ( lorsque l’organe n’est plus irrigué suffisamment par les voies sanguines. C’est le cas dans l’infarctus du myocarde, l’accident vasculaire cérébral ischémique). Toutes ces perturbations, ces désordres sont remontés par des capteurs appelés « nocicepteurs » et des voies sensitives nerveuses passant par la moelle épinière( où il y a un système réflexe ultra rapide : lorsque vous retirez la main vivement quand vous vous brûlez). Ces informations sont transmises au cerveau : c’est à ce moment-là que vous ressentez la douleur. C’est la douleur aiguë, celle qui disparait lorsque le désordre est réparé. Elle a un rôle d’alerte, utile et protecteur.
Lorsque les voies nerveuses sont endommagées par un traumatisme,comprimées par une tumeur bénigne ou maligne, endommagées par des traitements chimiques ou radiotherapiques lourds, ou lors d’une affection chronique, alors elles sont perturbées et ne jouent plus leur rôle normalement. Elles déclenchent de façon anarchique des douleurs , appelées « douleurs neuropathiques », de survenue, intensité et fréquence variables, qui ne sont plus en corrélation avec la lésion d’origine. La douleur est alors persistante et perturbe gravement la vie de celui qui la subit ainsi que celle de son entourage. La douleur est considérée comme « chronique« lorsqu’elle est subie depuis plus de trois mois et résistante aux traitements antidouleurs.
C’est une expérience sensorielle et émotionnelle . C’est là que l’unicité de chacun entre en jeu. Vous n’allez pas ressentir une douleur de la même façon que votre voisin. Vous ressentez la localisation, l’expression ( brûlure, coup de poignard, aiguilles, tiraillement, compression….), l’intensité, la durée, de façon personnelle et nul ne peut se représenter ce que vous ressentez à votre place.
De la même façon, votre réaction émotionnelle vous est propre. C’est pénible, gênant, ou insupportable : c’est votre ressenti. Tristesse, troubles du caractère, perte des intérêts, fatigabilité, troubles de l’attention, insomnie accompagnent souvent les douleurs chroniques.
L’anxiété, la dépression qui en découle est entendable si vous pouvez l’exprimer. Vos expériences personnelles, familiales, ou culturelles peuvent être des freins à l’acceptation ou à l’expression de vos émotions. « Dans ma famille, j’ai vu ma grand-mère, ma tante souffrir en silence » , » je désire épargner à mes proches ma plainte continuelle » » je dois avancer » sont des arguments que votre mental met en avant.
C’est pour cela que c’est difficile, d’exprimer, ou même d’entendre la souffrance de l’autre.
Ce sont les centres anti-douleur qui évaluent votre douleur et ses différentes composantes. Ils peuvent vous proposer de nombreux traitements, en association : médicamenteux, neurostimulation, mais aussi accompagnement psychologique, méthodes de relaxation, activité physique douce et adaptée, toucher-massages, hypnose, sophrologie,méditation, art-therapie, musicothérapie, esthetique…
Autant d’outils à votre disposition vers le mieux-être
2. Comment interviennent les techniques de la sophrologie ?
La sophrologie est une technique psychocorporelle, visant à harmoniser corps, coeur et mental. Sur le principe que toute action bénéfique sur l’une de ces trois parties, corps, coeur ou tête, se diffuse aux deux autres. Elle est complémentaire aux traitements médicamenteux. Elle n’annule pas la douleur chronique,très compliquée à gérer; ce n’est pas une baguette magique. En parallèle, en synergie avec votre suivi médical, elle permet de prendre conscience des différentes composantes , de votre mode de fonctionnement, et d’être acteur sur votre douleur, d’en diminuer progressivement votre perception, .
Par des techniques simples et efficaces, elle va permettre de vous mettre à l’écoute de vos ressentis, diminuer les tensions musculaires, diminuer vos émotions négatives et développer vos propres ressources pour réguler l’intensité et la perception de votre douleur.
Peu à peu, vous redécouvrez des espaces de calme, de confort dans votre corps,votre coeur et votre tête.
- En début de séance, le sophrologue cherche à comprendre avec vous votre situation : depuis quand vous avez des douleurs, comment vous les ressentez, comment vous les définissez, quelle est leur localisation, fréquence, leur durée, leur intensité; y-a-t-il un facteur déclenchant reconnaissable, des circonstances particulières; que faites-vous alors ; qu’est-ce qui vous soulage; avez-vous un traitement en cours, un suivi médical, psychologique ; quel est votre contexte familial; que vous dites-vous lorsque les douleurs surviennent; avez-vous d’autres soucis surajoutés : crampes musculaires, troubles du sommeil, anxiété ? Vous exprimez votre ressenti. Le sophrologue est à votre écoute, bienveillant. Il est attentif aux mots que vous employez pour bien comprendre la situation que vous vivez, le contexte dans lequel vous la vivez , dans une dimension globale.
Cela vous permet également de prendre une posture d’observateur; peut-être de prendre conscience de certaines circonstances ou réactions, de mettre un peu de distance avec votre douleur.
Ce temps de parole, d’échange est important.
Il est préférable de venir à distance d’une douleur aiguë; vous ne seriez pas suffisamment disponible pour la séance.
Vous définissez ensuite ensemble l’objectif pour la ou les séances à venir : quelle est la priorité , quel est un objectif raisonnable, réalisable. Peut-être que travailler sur les problèmes de sommeil vous permettrait de récupérer des forces ; peut-être avez-vous besoin de vous préparer à la prochaine séance de kinésitherapie ou à un examen que vous appréhendez; ou avez-vous besoin de retrouver un espace de joie; ou souhaitez-vous faire diminuer l’intensité de la douleur de quelques degrés ?
Le sophrologue vous guide ensuite , à la voix, à expérimenter, pratiquer des exercices :
- un exercice préliminaire : une lecture du corps pour abaisser le niveau de vigilance entre veille et sommeil, comme vous le vivez chaque jour avant de vous endormir et juste avant le réveil; propice à une meilleure présence à vous-même et une meilleure qualité d’intégration des exercices suivants.
- des exercices respiratoires :
La respiration, vitale, est automatique. Elle sert à aller chercher de l’oxygène, source d’énergie pour les cellules; et à éliminer le gaz carbonique. Lorsque vous avez mal, vous vous recroquevillez sur votre douleur et votre respiration se rétrécit, devient moins efficace.
Vous pouvez en prendre le contrôle. Les neurosciences l’ont étudiée : une respiration plus lente, profonde, régulière, rééquilibre la production des neurotransmetteurs, en diminuant les messages dynamiques de l’adrénaline et du cortisol et en augmentant les messages apaisants de la sérotonine et de la dopamine. Vous en avez une application dans la cohérence cardiaque ( voir les applications gratuites sur le téléphone mobile). Il existe de nombreux exercices respiratoires : respiration abdominale, respiration complète, respiration carrée….issus du yoga.
Revenir à sa respiration, de façon consciente, concentrée, permet de se focaliser sur une seule chose et de lâcher-prise. Vous retrouvez un espace de votre corps, vivant et rassurant.
- des exercices musculaires, relaxations .dynamiques :
Lorsque vous avez mal, vous mettez en tension, inconsciemment, les muscles de la zone douloureuse et alentour.
Remarquez la contracture, involontaire, des épaules, du cou, des mâchoires. Ce sont les premières zones impactées. Au moins vous les ressentez, les percevez ou voulez les percevoir, au plus elles s’amplifient, s’accentuent. Elles deviennent comme une carapace, extrêmement douloureuse, limitant vos mouvements.
Vous sont proposées des mobilisations douces de vos articulations, en conscience, en respectant vos limites à cet instant; sans forcer, avec bienveillance. Vous pratiquez quelques mouvements doux, attentif à vos ressentis physiques. Vous libérez les tensions musculaires accumulées.
Notre corps est fait pour bouger; il nous permet de communiquer avec notre environnement. Retrouvez, par cette attention à votre corps, un schéma corporel objectif : vous n’êtes pas que douleur. Vous pouvez trouver des espaces libres de douleur dans votre corps. Appuyez-vous sur ces capacités présentes pour retrouver peu à peu confiance, le plaisir de bouger; à votre rythme, selon vos amplitudes, sans douleur, progressivement. Encouragez votre corps, avec bienveillance et confiance.
Deux objectifs dans ces exercices :
– La respiration associée à la mobilisation douce diminue les tensions musculaires surajoutées et apporte calme et apaisement.
– La mobilisation douce, en étant attentif aux ressentis physiques permet de circonscrire les zones douloureuses; prendre conscience des zones libres de douleur et accepter la réalité de la douleur lorsqu’elle est présente. Vous en diminuez ainsi l’intensité et l’anxiété qui va de paire.
Revenir à l’écoute de soi avec bienveillance, sans se maltraiter.
- des exercices de visualisation positive :
Lorsque vous souffrez, votre attention est focalisée sur votre douleur
Les exercices de visualisation, guidés par le sophrologue, vous permet d’aller vers des sensations apaisantes.
Peut-être avez-vous déjà repéré des situations où vous vous sentez mieux: avec vos enfants, vos amis ; dans un lieu que vous aimez particulièrement; une activité, un loisir qui vous fait oublier quelque temps votre douleur.
Vous les avez partagées avec le sophrologue au début de l’entretien. Le praticien va vous guider, à la voix, avec des mots choisis, un ton calme, une posture bienveillante à revivre ces moments pour atteindre un niveau de relaxation physique et mentale profond.
Les visualisations guidées vous amènent à vivre des sensations agréables, que ce soit dans le passé,mais aussi dans le présent et le futur.
Elles agissent sur la composante sensorielle et émotionnelle dont nous avons parlé au-dessus, qui vous est propre.
Vous pouvez travailler ainsi sur de multiples axes.
Visualiser par exemple:
la confiance en l’efficacité des traitements médicamenteux ;
la diminution de la douleur par une visualisation apaisante de lumière, de froid comme un gant de glace, de chaud , -ce qui vous parle, qui résonne, ce qui fonctionne pour vous- sur la zone douloureuse;
respirer le calme, la détente;
visualiser votre bras douloureux tout léger comme un nuage;
visualiser vos cellules en activité réparatrice dans une zone en particulier ou la vitalité dans tout votre corps ;
visualisez votre prochaine séance vécue dans la sérénité;
vous projeter vers un objectif qui vous tient à coeur….
Les possibilités de visualisation sont nombreuses ; autant que toutes les composantes de votre douleur.
Montrez le chemin à votre cerveau : il fera tout ce qui est en son pouvoir pour s’y conformer.
Entretenez votre positif, votre agréable
Pour conclure :
Chacun vit différemment la douleur et cela lui est propre.
La sophrologie est un outil supplémentaire aux traitements médicaux. Elle permet une meilleure synergie vers votre mieux-être.
La sophrologie n’a besoin d’aucun appareil, d’aucun matériel spécifique : vous avez déjà tout en vous ! Respiration, mobilisation articulaire, visualisation sont à votre disposition.
De subissant, vous devenez acteur . Vous avez la possibilité, guidé au départ, puis de façon autonome lorsque vous vous serez approprié les techniques qui vous conviennent:
- d’instaurer un dialogue bienveillant avec son corps,
- d’aller vers des sensations apaisantes et rassurantes pour mieux vivre avec votre douleur ,
- d’en diminuer la perception, l’intensité.
Ceci est un apprentissage, et demande une persévérance et une régularité. Combien d’apprentissages avez-vous mené à bien ? De nombreux ! A commencer par la marche, le langage ; plus tard les études, le permis de conduire, un métier. Vous avez développé de nombreuses aptitudes au cours de votre vie.
Une fois que votre cerveau a compris le chemin vers plus de détente, de bien-être, il saura rapidement y aller tout seul, soyez-en convaincu ! Vous ne réfléchissez plus à comment avancer un pied devant l’autre pour avancer; à tourner le volant, manoeuvrer les manettes et les pédales pour la conduite…
Qu’en pensez-vous ?
Pour finir :
Félicitez-vous lorsque vous réussissez quelque chose ; réjouissez-vous lorsque vous recevez une bonne nouvelle.
Félicitez-vous à chaque progrès et ne vous faites pas de reproches si un évènement désagréable survient. Vous ferez mieux la prochaine fois.
Avec bienveillance, prenez soin de vous
Marie-Françoise